Amélie Mansfield

[Volume II, pp. 231 - 233]

LETTRE LXXII [Continuation IV]

Ernest á Adolphe

Du château de Woldemar, 28 Juin á minuit.

[p. 231] Le jour commence á paraître…… Tandis que je veille dans toutes les perplexités de l'incertitude, Amélie dort peut-être tranquille… . Mais puis-je [p. 232] je la supposer en paix, quand j'ai laissé passer quatre courriers sans lui donner de mes nouvelles? Hélas! j'espérais chaque jour un lendemain plus heureux, et je l'attendais pour lui écrire… . Que ne doit-elle pas penser de ce silence? L'image de sa situation me fait plus de mal que tous les chagrins que j'endure ici . . Cependant, avant la scène qui s'apprête, je veux essayer de lui écrire… Peut-être ne pourrai-je pas partir tout de suite; si ma mère me demande quelques jours pour réfléchir, je ne les lui refuserai pas; mais durant cette terrible suspension, je sens bien qu'il me serait plus difficile qu'en ce moment même de m'adresser á Amélie sans lui ouvrir tout mon coeur; et si je suis repoussé par ma mère, si sa cruauté me contraint á la fuir, pour déterminer Amélie, il faut qu'Albert ne soit plus en Suisse; Albert n'entendrait pas mon langage, il ne comprendrait pas que le devoir de l'amour est de braver tous les autres devoirs: c'est donc Amélie seule que je [p. 233] veux voir, c'est elle seule que je veux persuader.


Page Last Updated 10 March 2004