[Volume III, pp. 8 - 9]
Amélie á M. Grandson
12 Août, dix heures du soir.
[p. 8] Combien j'aurais voulu épargner á mon bienfaiteur, á mon ami, á mon second père, la douleur que je vais lui causer! . . je ne le puis, le ciel sait que je ne le puis. -- Je pars, je vous laisse mon enfant -- je suis sûre, que vous le protégerez -- consolez-le, s'il se peut, du malheur de m'avoir eue pour mère; apprenez á cette innocente créature á pardonner, même á celui qui cause ma mort. O mon oncle! quand je m'arrache des bras de mon fils, quand je vous abandonne, quand je parais ingrate [p. 9] et dénaturée, croyez qu'une fatalité plus forte que moi m'entraîne. Adieu, mon oncle! -- il sera peut-être long cet adieu . . Ah! je vous en conjure, ne me haïssez pas.
P. S. N'instruisez point Albert de mon départ avant d'avoir eu de mes nouvelles; promettez-le-moi, mon oncle, c'est la dernière grâce que j'implore; cette preuve d'amitié que vous me donnerez est de plus grand intérêt pour moi; mais, si dans un mois je ne vous ai point écrit, vous serez libre alors de révéler ma fuite á mon frère.
P. S. Mon frère prendra soin de mon fils, et lui apprendra á vous aimer comme sa mère vous aimait.
Page Last Updated 18 March 2004